Dossier 64, Jussi Adler Olsen

Carl, Assad et Rose reprennent du service avec un nouveau cold case ! Comment expliquer la disparition simultanée de cinq personnes en 1987, ayant pour certaines un lien bien triste avec l’île de Sprogo, qui servait auparavant d’asile d’aliénées ? Est-il bien vrai qu’on les y torturait, avant de les stériliser de force afin qu’elles ne viennent pas souiller de rejetons débiles la race danoise ? Curt Wad, qui brigue avec son parti des sièges au Parlement, est un des artisans de cette Lutte Secrète, et le voilà menacé par le département V, qu’il décide de mettre hors d’état de nuire.

9782226254214gQuatrième tome déjà des enquêtes de Carl et Assad, desquels on ne sépare désormais plus Rose, Dossier 64 est, à mon avis, le plus faiblard des tomes de la série.

Dans les deux premiers tomes, Miséricorde et Profanation, l’enquête était au coeur même du roman, et nos deux héros aussi différents que complémentaires devaient unir leurs forces et des méthodes opposées pour faire face aux formes les plus abouties de violence et de perversion.
Avec Dossier 64, l’auteur opte pour un ton d’emblée différent : davantage de réflexions qui se veulent humoristiques gâchent dès les premières pages mes retrouvailles avec Carl. Avec Nete Hermansen, on retrouve le système intéressant victime devenue bourreau développé dans Profanation, cette fois, forcément, avec un sacré sentiment de déjà vu.

Par ailleurs, l’enquête avance au petit bonheur la chance, et non véritablement grâce au travail de fond des enquêteurs. Seule Rose tire son épingle du jeu, là où Assad agit toujours dans l’ombre (pirouette évitant à l’auteur de nous décrire l’enquête !) et où Carl semble uniquement inquiété par sa relation avec Mona et son propre transit intestinal : pitié !
Enfin, le pauvre, pauvre Hardy est sacrifié sur l’autel d’un pseudo-suspense qui le laisse végéter, dans tous les sens du terme, depuis le premier tome. Qu’on en fasse quelque chose !

Pourtant, qu’on se le dise ; s’il devait y avoir un tome 5, alors je le lirai pour y retrouver ce qu’Adler Olsen semble avoir perdu au fil de sa série : le goût du thriller pur et dur.

La Madone de Notre-Dame, Alexis Ragougneau

Lorsque le corps sans vie d’une jeune femme entièrement vêtue de blanc est découvert dans Notre-Dame de Paris, le vagin scellé par la cire d’un cierge, les services de police sont sur les dents. Aidée par le père Kern, prêtre de la cathédrale, la procureur Claire Kern enquête sur ce meurtre aussi sordide qu’obscur, et doit composer avec la grossièreté crasse des flics parisiens, qui mène au suicide du principal suspect.

arton1708-1691bC’est à l’occasion de la première édition du festival Caractères, à Auxerre, en mai dernier, que j’ai fait la connaissance d’Alexis Ragougneau. La maison d’éditions Viviane-Hamy y célébrait les vingt ans de sa collection Chemins nocturnes, et Alexis Ragougneau venait y dédicacer son premier roman.

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Ce qui semble somme toute s’apparenter à un roman policier de facture classique bénéficie d’atouts de taille. Le lieu, emblématique, où le cadavre est découvert permet d’installer un cadre propice à une investigation policière hors norme, où chaque pas est freiné par des hordes de touristes plus ou moins respectueux. Par ailleurs, les abords de la cathédrale sont fréquentés par tout un monde de fanatiques religieux et de marginaux qui apporteront leur pierre à l’édifice dans l’enquête.

Et ce père Kern, qui n’a rien d’un prêtre classique ? Tout comme la procureur, il connaît des failles, des moments de faiblesse, des difficultés, tant physiques que morales. Et si, parfois, on peut se lasser des redresseurs de tort plus hantés par leurs démons que les assassins qu’ils arrêtent, on avouera qu’une palette de personnages n’a d’intérêt que dans sa singularité et ses défauts.

Enfin, le détail atroce du meurtre de la jeune femme ne transforme pas le roman en un thriller où la sauvagerie et le goût du glauque l’emportent sur l’enquête. On en comprendra la portée avec la résolution finale, mais que les plus réfractaires d’entre vous se rassurent : il s’agit bien d’un roman policier au sens traditionnel du terme, où seuls les personnages sont anticonformistes.